À l’heure où le prix de l’énergie devient une question cruciale, une bonne connaissance des dispositifs d’aides financières mobilisables pour prévenir ou enrayer la précarité énergétique est nécessaire.
Chiffres-clés
- 20 % des Français déclarent avoir souffert du froid au cours de l’hiver 2020-2021, pendant au moins 24 heures.
- 36 % d’entre eux déclarent que la raison est financière.
- 60 % des Français déclarent avoir restreint le chauffage chez eux pour ne pas avoir de factures trop élevées.
- 10,5 % des Français les plus modestes ont dépensé plus de 8 % de payer les factures énergétiques de leur logement en 2020.
Source : Médiateur national de l’énergie, ministère de la Transition énergétique, 2022.
1. Qu’est-ce que la précarité énergétique et quel est le public visé par la politique publique dédiée à sa lutte ?
La précarité énergétique atteint les personnes qui ne disposent pas de la fourniture d’énergie nécessaire à la satisfaction de leurs besoins élémentaires en raison de l’inadaptation de leurs ressources ou de leurs conditions d’habitat.
Les actions de lutte contre ce phénomène s’adressent aux locataires du parc privé ou social, et aux propriétaires, occupants ou bailleurs, selon une double approche, curative et/ou préventive. L’éligibilité des ménages dépend de critères de ressources.
2. Quels acteurs agissent contre la précarité énergétique ?
Depuis 2011, l’Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE) suit et analyse le phénomène de précarité énergétique et des dispositifs existants en vue d’aider à la décision les services de l’État, ses agences, les collectivités territoriales, les fournisseurs d’énergie et l’ensemble des associations et des professionnels œuvrant dans le domaine.
Placée sous la tutelle des ministères en charge de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, de la Transition écologique et de l’Économie, des Finances et de la Relance, l’Agence nationale de l’habitat (Anah) a pour mission d’améliorer l’état du parc de logements privés existants pour lutter contre les fractures sociales et territoriales. Elle encourage les travaux de rénovation et de réhabilitation des logements en accordant des aides financières. C’est le partenaire privilégié des collectivités territoriales pour leur permettre d’intégrer la dimension du parc privé dans leurs politiques locales de l’habitat.
Le médiateur de l’énergie est une autorité publique indépendante qui propose des solutions amiables aux litiges entre entreprises du secteur de l’énergie et consommateurs, et informe sur les droits de ces derniers et l’utilisation des aides existantes. Dans le cadre de difficultés de paiement et de coupure de fourniture d’énergie, il les oriente dans leurs démarches et peut se mettre en rapport avec les interlocuteurs dédiés chez les fournisseurs pour élaborer des solutions. Il s’est exprimé en faveur de la mise en place d’un droit à une alimentation minimale en électricité pour les foyers les plus précaires. Il participe à l’ONPE.
3. Quels sont les indicateurs permettant de suivre la précarité énergétique ?
L’ONPE s’appuie sur trois indicateurs de suivi de la précarité énergétique. Les deux premiers mesurent l’évolution de la réalité économique et sociale des ménages via leur consommation [taux d’effort énergétique (TEE) et indicateur bas revenus dépenses élevées (BRDE)]. Ils permettent de comparer les dépenses d’énergie des ménages à leurs ressources et de proposer des seuils pour évaluer la soutenabilité des dépenses ou la vulnérabilité des ménages aux aléas économiques. Ils sont calculés à partir de données d’observation de l’Enquête nationale logement de l’INSEE et du Service des données et études statistiques.
Le troisième indicateur consiste en une approche par le ressenti des ménages au froid et mesure le niveau d’inconfort thermique ressenti par les ménages, notamment par des phénomènes d’auto-restriction. Il est tiré du baromètre énergie-info réalisé par le médiateur national de l’énergie. Ces indicateurs intègrent une condition sur le revenu des ménages par unité de consommation afin de ne retenir que les ménages dont la consommation énergétique n’est pas soutenable ou dont la sensation d’inconfort thermique est associée à une contrainte financière forte.
4. Quels acteurs agissent contre la précarité énergétique sur le terrain ?
La lutte contre la précarité énergétique mobilise des acteurs variés, élus, agents de services techniques, bailleurs sociaux, associations et opérateurs privés ou publics. Ils interviennent dans le cadre de leurs missions respectives, d’ordre social, économique, environnemental ou énergétique, et sur une base réglementaire, militante ou politique. Leurs actions s’inscrivent dans les contextlogees territoriaux spécifiques. Leur succès est lié à leur bonne coordination et à l’articulation de leurs dispositifs.
5. Que font les collectivités territoriales pour lutter contre la précarité énergétique ?
Les collectivités déploient des opérations programmées d’amélioration de l’habitat ou des programmes d’intérêt général pour organiser localement le recours aux aides ANAH, ou mènent des actions spécifiques à l’échelle de leurs territoires.
Le conseil régional, chef de file en matière de climat, de qualité de l’air, d’énergie, et de mise en œuvre de la transition énergétique (loi Maptam, art. 2), favorise des actions d’efficacité énergétique et de lutte contre la précarité énergétique (loi TECV, art. 188). Il est chargé du programme régional pour l’efficacité énergétique (code de l’environnement, art. L.222-2) et peut financer les programmes d’aide à l’amélioration de la qualité de l’habitat (code de la construction et de l’habitation (CCH), art. L.312-5-2).
Le conseil départemental, chef de file de la lutte contre la précarité énergétique (loi Maptam, art. 3), finance et gère le Fonds de solidarité pour le logement (FSL). Il signe le contrat local d’engagement et peut financer les programmes d’aide à l’amélioration de la qualité de l’habitat, des quartiers et des logements (CCH, art. L.303-1).
La commune ou l’établissement public de coopération intercommunale élabore le Plan climat-air-énergie local et peut créer une plateforme territoriale de la rénovation énergétique (CCH, art. L.232-2).
Les outils de planification tels que le programme local de l’habitat (CCH, art. L.302-1), le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées (code de l’action sociale et des familles, art. L.312-5-3) complètent l’arsenal.
6. Quels sont les dispositifs curatifs légaux de lutte contre la précarité énergétique ?
Des aides financières permettent d’aider les consommateurs à régler leurs factures d’énergie.
Un chèque énergie d’un montant de 48 à 277 euros est distribué à l’échelle nationale par le ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires aux propriétaires occupants et aux locataires. Depuis 2021, son envoi est automatique en avril sur la base des données déclarées auprès des services fiscaux. Il peut également servir à réaliser des projets de travaux de rénovation énergétique. Un chèque énergie complémentaire exceptionnel de 100 euros a été versé en décembre 2021 pour aider les ménages modestes à faire face à la hausse exceptionnelle des prix de de l’électricité et du gaz. Il est utilisable jusqu’au 31 mars 2023.
Le FSL est mobilisable, sous forme de subvention ou de prêt, pour aider les ménages modestes en difficultés à payer leurs factures d’énergie. Il est délivré sur présentation de facture, soit au ménage soit directement au fournisseur d’énergie.
Dans un contexte inédit de hausse des prix des énergies, un dispositif exceptionnel, le bouclier tarifaire, protège les ménages de la hausse des prix du gaz naturel et de l’électricité jusqu’au 31 juin 2023 en limitant la hausse des tarifs réglementés du gaz et de l’électricité à 15 %, respectivement à compter de janvier et de février.
7. Quels sont les dispositifs curatifs subsidiaires de lutte contre la précarité énergétique ?
Des aides financières extra-légales au paiement des dettes énergétiques peuvent être mises en œuvre au niveau régional, départemental, intercommunal ou communal, en complément des prestations légales. Les caisses d’allocations familiales, la Mutualité sociale agricole et les caisses de retraite proposent des prêts sans intérêt ni frais de dossier, ou une subvention de secours aux familles bénéficiaires d’une prestation de la CAF ou de la MSA, ou retraitées, qui ne peuvent pas faire face à leurs charges d’énergie.
Une majorité de centres communaux ou intercommunaux d’action sociale distribue des aides financières issues de politiques volontaristes pour l’aide au paiement des impayés ou des factures d’énergie. Ils informent des dispositifs existants, orientent les ménages dans les choix à faire et instruisent les dossiers d’aides légales. Dans le cadre de l’action dédiée de leur collectivité, ils peuvent organiser des actions de repérage en vue de sensibiliser les ménages. Des associations caritatives distribuent également des aides facultatives à destination des publics les plus précaires.
8. Comment prévenir la précarité énergétique ?
Un ensemble de mesures prévient la précarité énergétique, selon trois angles d’attaque, à savoir un accompagnement dédié, un arsenal d’aides, de prêts et de primes ainsi que des dispositifs fiscaux favorables.
France Rénov’ est le service public de la rénovation de l’habitat, porté par l’État, piloté et animé au niveau national par l’Anah. Il constitue le cadre d’intervention coordonné entre l’État et les collectivités, en matière de rénovation de l’habitat privé. Il est un point d’entrée unique ayant pour objectif de garantir à tous les ménages un parcours usager simplifié à travers une offre renforcée et harmonisée d’information et de conseil neutres, ainsi que leur accompagnement pour la rénovation de leur logement.
Au plan fiscal, des avantages sont octroyés en matière de TVA et d’exonération de taxe foncière sur la base de dépenses liées à l’installation d’équipements en faveur d’économies d’énergie. Des actions hors travaux telles que du conseil et de l’information en termes d’usage du logement et des équipements permettent de mieux maîtriser les consommations et d’améliorer le confort thermique des logements.
9. Que comporte l’arsenal d’aides, de prêts et de primes pour la rénovation énergétique ?
Afin d’accompagner la transition énergétique de la France et d’améliorer les performances énergétiques de l’habitat privé des propriétaires occupants et bailleurs, la réalisation de travaux est aidée par le versement de subventions par l’Anah dans le cadre des programmes MaPrimeRénov’.
MaPrimeRénov’ Copropriété concerne les travaux sur les parties communes et les parties privatives déclarés d’intérêt collectif des copropriétés. MaPrimeRénov’ Sérénité est attribuée aux propriétaires occupants disposant de ressources modestes ou très modestes.
D’autres aides sont versées dans le cadre de l’auto-réhabilitation accompagnée et dans celui de travaux de rénovation énergétique en vue de la location à des locataires répondant aux conditions de ressources et à un loyer inférieur au prix du marché.
Les trois programmes de certificats d’économies d’énergie « précarité énergétique » sont financés par les fournisseurs d’énergie. Pour massifier les travaux de rénovation énergétique dans les logements en solvabilisant les ménages, des éco-prêts à taux zéro peuvent être consentis.
10. Qu’est-ce que « Mon accompagnateur Rénov’ » ?
Dans le cadre du service public de la performance énergétique de l’habitat, le recours à un tiers de confiance, sous l’appellation « Mon accompagnateur Rénov’ » est obligatoire au-delà d’un montant de travaux de rénovation globale aidée supérieur à 5 000 euros (MaPrimeRénov’ Sérénité) et, à compter du 1er septembre 2023, les bouquets de travaux de plus de deux objets faisant l’objet d’une demande de subvention supérieure à 10 000 euros, ainsi que les travaux au-delà de ces seuils intervenant dans les trois ans de la formulation d’une première demande d’aide.
Ce tiers est chargé de traiter les difficultés rencontrées par les ménages dans leur projet de rénovation, qu’il s’agisse des aspects financiers, administratifs, techniques et sociaux. L’accompagnement comprend une évaluation de l’état du logement, de la situation du ménage, un audit énergétique et la préparation et l’accompagnement à la réalisation du projet.