Union européenne : comment mieux protéger les forêts du risque incendie ?

La Rédaction — 13 octobre 2022 à 15h46

Alors que les incendies de forêt se multiplient sur le continent, la Commission européenne souhaite voir « évoluer positivement » le bois mort. 

Pas moins de 508 000 hectares de forêts sont partis en fumée dans l’Union européenne cet été, contre une moyenne d’environ 215 000 hectares pour la même période en 2006-2021, d’après les chiffres du programme Copernicus. La portée, la fréquence et l’intensité des incendies ont augmenté : + 30 % de la superficie brûlée par rapport à 2017, la plus mauvaise année précédemment enregistrée et + 170 % par rapport à la superficie annuelle moyenne brûlée depuis le début des compilations des données européennes, en 2006.

C’est dans ce contexte inquiétant que la Commission européenne a décidé de renforcer sa flotte pour lutter contre les feux de forêts. Afin de « garantir une réaction rapide et souple, y compris dans des situations de départs d’incendies simultanés dans plusieurs États membres », la Commission a proposé 170 millions d’euros provenant du budget de l’UE pour renforcer son Mécanisme européen de protection civile, « rescEU ».

Une initiative qui vient s’ajouter à l’arsenal visant la restauration des écosystèmes naturels dégradés. Le 22 juin en effet, la Commission a présenté une nouvelle loi sur la restauration de la nature. Près de 100 milliards d’euros seront octroyés aux États membres, qui s’engagent en échange à préparer et adopter des plans nationaux pour restaurer la nature et inverser la perte de biodiversité dans l’agriculture, les forêts, les océans et les zones urbaines.

PROTECTION CONTRE LES INCENDIES VS PRÉSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ ?

La Commission espère que les États membres s’engageront notamment à inverser le déclin des populations de pollinisateurs, à élargir les espaces verts urbains ou encore à augmenter la biodiversité dans les écosystèmes forestiers en promouvant « une évolution positive de la connectivité en forêt, du bois mort, de la proportion de forêts inéquiennes, des espèces d’oiseaux et du stock de carbone organique. »À lire aussi :La catastrophe climatique au Tchad laisse 2,1 millions de personnes affamées

Cet objectif pourrait-il nuire à la préservation des forêts contre le risque incendie ? La surprésence de biomasse en forêts contribue en effet à l’augmentation du risque de propagation des feux.

Le constat est partagé par de nombreux militants écologistes, comme Sylvain Angerand, porte-parole de l’association française Canopée forêts vivantes. « Une biomasse importante favorise le risque d’incendies », reconnaît le militant qui plaide pour un taux de 25 % de forêts en libre évolution en France. Riches en bois mort, ces dernières sont « essentielles pour la biodiversité » estime-t-il. Mais « cela ne veut pas dire qu’il doit y en avoir partout. Il faut réfléchir à une bonne répartition », affirme le militant.

Anne-Catherine Loisier, sénatrice UDI de Côte-d’Or, est quant à elle persuadée qu’« il est possible de concilier la protection de la biodiversité et la réduction de la vulnérabilité des forêts face au risque d’incendie, cela peut même être complémentaire ».

UNE PROBLÉMATIQUE ABSENCE DE GESTION

Le rapport d’information sénatorial « Feux de forêt et de végétation : prévenir l’embrasement », qu’elle a corédigé, montre qu’une forêt aménagée est moins vulnérable aux incendies. « Dans ces conditions, les forêts en libre évolution ne peuvent pas être synonymes d’absence de gestion. Une forêt sans accès, avec des arbres morts, cela peut brûler très vite », prévient Mme Loisier.

La profession forestière est du même avis. Dans un entretien accordé à Euractiv, Albert Maillet, directeur à l’Office national des forêts (ONF), insiste sur le caractère indispensable de la gestion forestière pour diminuer les risques. « Une forêt non gérée est plus propice aux incendies qu’une forêt gérée, souligne aussi le dirigeant. En exploitant du bois, nous retirons de la biomasse combustible. Après avoir débroussaillé, le feu n’a rien à se mettre sous la dent ».

Certes, « il ne faut non plus aller trop loin. Car une extraction brutale peut aussi éclairer le sol et favoriser le sous-bois (qui permet au feu de démarrer). Mais l’homme doit intervenir. Un système en libre évolution est bien plus dangereux », conclut le dirigeant.

Entre protection des forêts contre les incendies et préservation de la biodiversité, il n’est pas toujours nécessaire de choisir. 

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