Quelque 200 personnes ont défilé le 7 octobre à Châtellerault, dans la Vienne, pour demander un moratoire contre les fermes-usines. Une vingtaine d’actions de ce type étaient organisées en France.
Cloches, tambourins, sifflets, crécelles… Environ 200 personnes ont défilé le 7 octobre à Châtellerault, dans la Vienne, à l’appel de la coalition Résistance aux fermes-usines (Rafu). « Notre objectif est de nous faire entendre pour réaffirmer notre opposition au projet de Coussay-les-Bois, mais aussi de toutes les fermes-usines en France », explique Michelle Martin, membre de l’Association de sauvegarde et de protection de l’environnement de Coussay-les-Bois et de sa région thermale (Aspect). À ses côtés, la Confédération paysanne, Les Amis de la Terre, les Coquelicots, Greenpeace, Attac ou encore Bassines non merci. Ensemble, et dans plusieurs villes, ils ont exprimé leur rejet de la production industrielle d’animaux et de végétaux, et ont demandé un moratoire sur les fermes-usines.
Depuis 2014, Aspect lutte contre un projet de ferme-usine de 1 200 taurillons à Coussay-les-Bois. L’association venait tout juste de faire fermer un site d’enfouissement de déchets contre lequel elle se battait depuis dix ans. Elle a alors repris la lutte, avec la commune. « La mairie a refusé de signer le premier permis de construire en 2014. Alors c’est le préfet qui l’a signé, raconte Anny Lauzier, coprésidente d’Aspect et conseillère municipale de Coussay. Ce que nous craignons, c’est la même chose qu’avec le centre d’enfouissement : la pollution de l’eau. Il y a une nappe phréatique juste en dessous, peu profonde, qui alimente trois communes : Coussay-les-Bois, Mairé et Lesigny. »
Les démarches en justice ont d’abord donné raison aux opposants : en 2017, le tribunal a rejeté les demandes de permis de construire et d’exploiter déposés par la SCEA Les Nauds, porteuse du projet. Mais elle l’a emporté en appel. Après de nombreuses autres démarches, « nous avons déposé de nouvelles plaintes contre une série d’irrégularités dans la conduite de travaux, précise François Bigot, président de l’association Val de Gartempe Creuse Anglin (VGCA). Ce sera jugé au tribunal correctionnel en février 2024. Nous avons aussi demandé une réunion avec le sous-préfet et attendons son retour ».
« C’est de l’industrie »
Trois bâtiments ont d’ores et déjà vu le jour sur le site, recouverts de panneaux photovoltaïques. L’un d’eux est en cours d’aménagement pour accueillir les animaux. La mairie de Coussay est mise en cause par l’entreprise de panneaux photovoltaïques pour avoir refusé un permis modificatif et devra pour cela passer devant le tribunal administratif.
Outre les dangers que le projet fait peser sur la ressource en eau, les opposants dénoncent également le modèle agricole des fermes-usines. « Il faut arrêter de parler de ferme : c’est de l’industrie, affirme Nicolas Fortin, secrétaire national de la Confédération paysanne, éleveur dans la Vienne. Le projet, ce n’est pas la production de viande, c’est la production d’énergie : 1,5 hectare pour du photovoltaïque et de la méthanisation. La viande devient un sous-produit. C’est de la concurrence déloyale : l’agriculture industrielle est prédatrice de l’agriculture paysanne. » Son syndicat milite pour un retour au modèle de polyculture-élevage.
Parti de la Manu, site d’une ancienne manufacture de Châtellerault, le cortège a déambulé dans les rues en s’arrêtant sur les marchés, place de l’Hôtel de Ville et finalement devant la sous-préfecture. Quelle sera la conséquence de la manifestation ? Certains participants en appellent à « des formes différentes de résistance », évoquant par exemple l’occupation, une zad… Aspect n’annonce pas de nouvelles actions, mais l’assure : « Si les taurillons arrivent, nous serons mobilisés ! » Et rappelle que la pétition pour le moratoire est toujours en ligne.