« Inefficaces », « coûteuses », « polluantes » : les éoliennes sont toujours la cible de vives critiques dans le Centre-Val de Loire. France 3 se penche sur les clichés les plus tenaces qui saturent le débat.
Chaque année, la même polémique éclate aux quatre coins de la région. Lorsqu’il est question d’installer des éoliennes, les débats sont souvent houleux entre élus, promoteurs, préfets et citoyens.
Le 28 septembre dernier, par exemple, le Conseil d’État a retoqué le projet d’un parc éolien sur les communes d’Argenton-sur-Creuse, Vigoux et Celon (Indre), pour le plus grand bonheur des opposants.
L’an passé, le Conseil municipal de Sorigny (Indre-et-Loire) avait voté contre un projet éolien malgré le soutien du maire de la commune au projet. Quelques années plus tôt, en 2018, la création d’un parc d’éoliennes dans la commune de Ligueuil avait créé la polémique.
Et pourtant, l’installation des éoliennes se poursuit dans presque toute la région Centre. L’Eure-et-Loir est d’ailleurs classé septième département de France, avec, au total, 282 installations sur les 570 que compte la région.
Dans ses conditions, difficile de se faire sa propre opinion sur ces installations. Alors, France 3 Centre-Val de Loire s’est retroussé les manches pour tenter d’y voir plus clair.
Les éoliennes ne fonctionnent que 25 % du temps
Attention aux confusions ! Les éoliennes ne fonctionnent pas à 100 % du temps, pour une raison simple : elles dépendent des aléas du vent. Si ce dernier est trop faible (moins de 10 km/h) ou trop fort (plus de 90 km/h), les turbines ne fonctionnent pas. Mais selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), les éoliennes françaises sont actives, en moyenne, entre 75 % et 90 % du temps sur une année.
Le chiffre de 25 % est vrai à condition de parler de capacité de production. Une éolienne produit, en moyenne, 25 % de la capacité totale qu’elle serait capable de produire si elle fonctionnait à plein régime toute l’année.
Les éoliennes coûtent chères et ne rapportent rien
Sur la question du coût de l’éolien, c’est encore la foire aux approximations. En 2019, Marine Le Pen avait dénoncé des aides de l’État qui seraient trop élevées, à hauteur de huit milliards d’euros.
En réalité, la même année, la filière a reçu 1,3 milliard d’euros d’aides, une somme bien inférieure à celle avancée par l’ex-candidate à l’élection présidentielle.
Et si ces dernières années les soutiens de l’État étaient supérieurs aux revenus de la filière, les temps ont changé : « La recette prévisionnelle liée aux énergies renouvelables électriques s’élève, au titre de 2022 et 2023, à 8,6 Md€ cumulés pour le budget de l’État. La filière éolienne terrestre contribue majoritairement à cette recette, à hauteur de 7,6 Md€ »,détaille Stefan Louillat.
Au niveau local aussi, les éoliennes apportent des retombées économiques. Entre 10 000 et 15 000 euros par éolienne pour la commune qui accepte ces installations. Ensuite, l’opérateur paye la contribution de la valeur ajoutée des entreprises qui rapportent en moyenne 10 000 euros par mégawattheure (MWh) et par an pour l’intercommunalité. À cela, il faut ajouter les revenus liés aux locations foncières quand la commune est propriétaire : 2500 euros par MW et par an.
Les éoliennes font baisser le prix de l’immobilier
L’installation d’une éolienne ou d’un parc éolien aurait des effets néfastes sur le marché immobilier de la zone concernée. Mais là encore, l’impact serait infime. La seule étude sur la question a été réalisée par l’Ademe. Selon l’agence, l’impact est dérisoire sur le prix des transactions immobilières en ce qui concerne les biens situés à plus de 5 km d’un parc éolien.
S’il y a un effet à la baisse, l’étude montre qu’elle se limite à une perte de valeur de 1,5 % en moyenne du mètre carré et elle ne concernerait que 10 % des maisons vendues entre 2015 et 2020.
Mais qu’en est-il des maisons situées à moins de 5 km ? C’est une question qui n’a pas de réponse. Il n’existe aucune donnée objective à ce sujet précis. « Peut-être qu’il y a un impact, peut-être pas. Nous n’avons aucune donnée qui permet d’en avoir la certitude« , reconnaît Stefan Louillat, chef du service électricité renouvelable de l’Ademe.
Des décotes de l’ordre -5 à -20 % sont malgré tout estimées sur la base de témoignages de professionnels de l’immobilier dans des cas très particuliers. Par exemple, s’il s’agit d’un bien d’exception (château, manoir, demeure de luxe…) situé à proximité directe des éoliennes, de l’ordre de 500 à 1 000 mètres.
L’éolien utilise des métaux rares, elles sont anti-écologiques
C’est aussi une affirmation que l’on entend souvent dans la bouche des « anti éoliennes ». À Argenton-sur-Creuse (Indre) par exemple, les opposants au projet retoqué par le Conseil d’État les qualifiaient de « trompeuses, intermittentes, anti-écologiques« . Là encore, c’est inexact.
Parmi les points régulièrement soulevés pour dénoncer l’installation des éoliennes, l’utilisation des terres rares, souvent importées de Chine. Ces dernières permettent la fabrication des aimants permanents des rotors des éoliennes. « Mais pour les éoliennes terrestres que l’on trouve dans le Centre-Val de Loire, les fabricants n’en utilisent plus« , précise Stefan Louillat.
Reste que pour les éoliennes les plus anciennes, la part de terres rares représente 0,001 % du poids total de l’éolienne. C’est 100 fois moins que pour un téléphone portable. « À l’Ademe, on ne dit pas que les éoliennes n’ont pas d’impact. Comme pour toutes les infrastructures humaines, il y en a. Mais il faut regarder les faits objectivement« , insiste le spécialiste.
Selon le groupe d’experts du climat des Nations Unies (Giec), l’éolien terrestre affiche le plus bas taux d’émission en gramme de CO² par kilowattheure (CO² eq/kWh) : 11g en moyenne, contre 12g pour le nucléaire. Une éolienne n’en émet qu’au moment de sa construction.