La France vise une baisse des émissions du secteur des transports de 28% d’ici à 2030 et une décarbonation complète pour 2050. Pour répondre à cette ambition, le train semble un élément structurant dans la proposition de transport décarboné.
Avec
- Valentin Desfontaines Responsable mobilités durables au Réseau action climat
- Sylvie Landriève Directrice du forum vie mobiles
Quels sont les freins aujourd’hui qui empêchent les français de prendre davantage le train ? Quelles seraient les solutions envisagées pour faciliter l’accès au train et son usage ? Quelques pistes sont d’ores et déjà lancées, un « ticket climat », des TER à 1e et un plan de 100 milliards d’euros pour le transport ferroviaire français.
Le train représente 8 à 20 fois moins d’émission de CO2 que la voiture. Le transport ferroviaire représente 10% du trafic de voyageurs et de marchandises, il n’est responsable que de 1,6% des conso d’énergie et de 0,4% de CO2 des transports.
Selon le récent sondage de Réseau Action Climat, les français attendent en priorité une baisse des prix et un plus grand respect des horaires. Si les français ne choisissent pas le train c’est qu’ils ont besoin d’un moyen de transport pour se déplacer une fois arrivés à destination.
Bien que près de 8 Français sur 10 disent prendre le train au moins une fois de temps en temps, son usage reste néanmoins marqué par de très fortes disparités territoriales. En effet, si 81% des habitants des grandes agglomérations s’estiment bien desservis par le train, ils sont uniquement 35% dans les zones rurales.
Le train, la nouvelle hype
Le train a plutôt la hype concernant son rôle dans la décarbonisation des transports, Valentin Desfontaines a voulu en savoir plus en interrogeant les Français sur leur perception du train, leurs déplacements effectifs : « L’enjeu de cette enquête qu’on a réalisé, c’est de mieux comprendre à quel point les Français ont le sentiment d’avoir accès à une offre de trains, d’avoir une gare en proximité et surtout si on veut réduire les émissions du transport, c’est de comprendre quels étaient les freins à l’usage du train. Pourquoi est-ce qu’on ne l’utilise pas davantage aujourd’hui en France, et surtout, quelles seraient les politiques à mettre en place pour aider, encourager les Français à davantage utiliser le train ? »
Ce qui en a été sorti de cette enquête, c’est que 83 % des Français reconnaissent que le train a un énorme avantage écologique. Ils sont prêts à l’utiliser davantage à condition qu’il soit pratique et pas à n’importe quel prix : « La question du prix reste pour les Français le premier frein à l’usage du train. Près de six usagers sur dix qui estiment que le prix du train a augmenté au cours des trois dernières années. L’autre enjeu, c’est la praticité. Pour pouvoir arriver facilement dans une gare, mais aussi, une fois qu’on est arrivé en gare de destination, avoir à disposition une voiture ou une offre de transport en commun pour rejoindre sa destination finale. »
Des trains propulsés à l’électricité
En France, le transport concentre à lui seul un tiers des émissions de gaz à effets de serre, et à l’intérieur de ce tiers, tout ce qui se déplace sur route, représente 90 % des émissions. Il faut donc trouver un moyen plus écologique que la voiture pour se déplacer. Aujourd’hui, on fait en moyenne 40 kilomètres par jour. De ce point de vue-là, les deux atouts principaux du train, c’est sa capacité à pouvoir faire voyager beaucoup de personnes, et aussi le fait qu’il soit majoritairement propulsé à l’électricité qui est produite avec une part importante de nucléaire..
80 fois moins d’émission en train qu’en avion
Si on fait un trajet Paris-Marseille en train, on émet 80 fois moins d’émissions à effets de serre qu’en avion. L’Agence de l’environnement a d’ailleurs mis en place un calculateur d’émissions de CO2 par passager, pour pouvoir calculer ses trajets. En TER, pour un même trajet, on émet sept fois moins de CO2 qu’en voiture.
Sortir du tout voiture
Pour Sylvie Landriève : « Si on veut sortir du système tout voiture dans lequel on est, il faut réfléchir à ce que le train soit dédié au collectif et qu’il soit fluide. On pourrait y mettre le RER, le métro, le train, mais aussi les tramways, et même les trolleys qui reviendraient peut-être à la mode. »
Qu’est-ce qui explique le prix des billets de train ?
Une auditrice a voulu réserver deux billets de train sur Ouigo. Pour faire 565 kilomètres, le prix était de 700 euros. Beaucoup d’usagers se plaignent des prix prohibitifs du train. Même si ce moyen de transport est plus écologique, beaucoup privilégient la voiture pour des raisons économiques. Mais pourquoi le train est-il devenu si cher ? Selon Sylvain Landriève : « Quand on se déplace sur de longues distances, on compare de suite le train à l’avion. La différence, c’est que l’avion est le seul transport où le carburant n’est pas taxé, contrairement à l’électricité pour le train ou l’essence pour la voiture. Il en est de même pour la TVA en avion si vous voyagez en Europe, il n’y en a pas. »
Le prix du billet de train, est principalement composé à 40 % de ce qu’on appelle des péages ferroviaires. Comme pour la voiture et le péage routier, les trains payent également un péage qui appartient à SNCF Réseau : « Si une région décide de faire rouler un train, où même la SNCF, ils payent un péage. » Avec l’ouverture à la concurrence, la SNCF a une logique de distinction entre le gestionnaire du réseau qui est SNCF Réseau, et de l’autre, la SNCF, qui a des activités de transport de voyageurs.
Nous avons en France le niveau de péage ferroviaire le plus cher d’Europe. Il permet de financer de nouveaux trains, mais surtout d’entretenir le réseau qui vieillit vite : « Soit un Etat décide de faire du ferroviaire sa priorité politique et va mettre beaucoup d’argent dans l’entretien du réseau, soit, comme en France, le réseau est en grande partie financé par le secteur ferroviaire et cela dissuade de mettre davantage de trains puisque l’opérateur paye cher pour chaque train. Et cela a des conséquences directes sur le prix des billets. C’est un des freins à la politique du développement du train en France. Il y a une logique compréhensible à mettre moins de trains, mais à les remplir davantage, et ça se fait au détriment du prix et du développement de l’offre. » Aujourd’hui, il y a une demande de trains de plus en plus importante, mais vu que l’offre n’augmente pas, les prix eux augmentent. Il faudrait que la SNCF mette davantage de trains pour relâcher la pression sur les prix.
Pour en savoir plus, écoutez l’émission…
Sylvie Landriève est la co-autrice de » Pour en finir avec la vitesse » La Tour-d’Aigues, Éditions de l’Aube