Selon l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, 53 % des Français considèrent que cette énergie a été une bonne chose pour la France, mais ils seraient 45 % à s’opposer à la construction de nouvelles centrales.
Le choix du nucléaire n’a jamais fait l’objet de consultation publique, et pourtant les Français restent majoritairement attachés à cette énergie intimement liée à l’histoire industrielle du pays. C’est en tout cas ce qui ressort du dernier baromètre de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) sur la perception des risques et de la sécurité, publié en mai. A l’occasion des 10 ans de l’accident de Fukushima (Japon), l’établissement public a réalisé une vaste étude permettant de retracer l’évolution du ressenti des Français à l’égard du nucléaire. Selon l’IRSN, 53 % d’entre eux considèrent que le nucléaire a été une bonne chose pour la France. Un score record, puisque, dans les années 1990, ils étaient moins de 30 % à le penser.
Curieusement, cela n’a pas grand-chose à voir avec le réchauffement climatique. Et pour cause, les Français, qui vivent pourtant dans le pays le plus nucléarisé au monde,souffrent en fait d’un grave défaut d’information sur le sujet. A 69 %, ils restent persuadés que le nucléaire contribue aux émissions de gaz à effets de serre (sondage BVA, 2019), alors même que le climat est devenu l’une de leurs préoccupations majeures (la 3e, derrière la santé et le terrorisme). S’agissant de la perception des risques du nucléaire, la question du stockage des déchets est repassée, en 2020, devant celle des accidents (qui était remontée très fort après Fukushima), et des coûts élevés de l’industrie.
Sécurité énergétique
Au fond, pourquoi les Français restent-ils tellement attachés à leurs vieilles centrales ? En fait, comme à l’époque de la construction du parc, dans les années 1960, c’est l’argument de la sécurité énergétique qui reste prépondérant, suivi de peu par celui de l’électricité bon marché.
Comment replacer ces chiffres dans les débats actuels ? Faut-il en conclure que les Français sont prêts à resigner pour les cinquante prochaines années ? Rien n’est moins sûr. Selon l’IRSN, ils seraient 45 % à s’opposer à la construction de nouvelles centrales, contre 29 % seulement favorables. Mais EDF, qui a réalisé son propre sondage maison, arrive à des conclusions sensiblement différentes : selon l’électricien, 52 % des Français seraient convaincus qu’on ne pourra pas se passer de nucléaire dans les trente ans à venir, même en développant massivement les renouvelables… Comme toujours avec les sondages, il faut se méfier de la façon dont la question est posée.
Julie de la Brosse
journal Le Monde