Interrogés par le Centre d’étude de la vie politique française à la veille de leur congrès, les maires ne cachent pas leurs inquiétudes face à l’explosion des prix de l’énergie et la montée des incivilités contre les élus. Un mandat de crise. Après le Covid-19, la hausse vertigineuse des tarifs de l’électricité frappe à la porte. A la veille de leur congrès des 22, 23, 24 novembre à la Porte de Versailles de Paris, les maires ne cachent pas leur désarroi.

Interrogés par le Centre d’étude de la vie politique française, 35 % d’entre eux se montrent « très préoccupés » 42 % « préoccupés » par les prix de l’énergie qui augmentent de 30 % à 300 % selon les localités. Pour alléger cette addition salée, 90 % des maires interrogés dans l’enquête du CEVIPOF pour l’AMF prônent une réduction de l’intensité et de l’amplitude horaire des éclairages. Parmi les autres recettes privilégiées : la réduction du chauffage dans les installations sportives plébiscitée à hauteur de 86 %, l’extinction de l’éclairage la nuit (76 %) et la réduction des décorations du noël (70 %). Mais pas question de fermer des équipements sportifs : 79 % des maires sont contre. Quant à la réduction du chauffage dans les écoles primaires et les crèches, elle divise les édiles. 49 % souhaitent privilégier cette piste. 46 % sont d’un avis contraire.

Par ailleurs, 40 % des maires envisagent de renoncer à recruter du personnel dans les prochains mois et 18 % d’augmenter les impôts.

Agressivité et insultes

L’enquête du CEVIPOF pour l’AMF met aussi en lumière un climat très tendu entre les élus et une partie grandissante de la population. 63 % des maires disent avoir été victimes d’incivilités (impolitesse, agressivité), contre 53 % en 2020, 37 % d’injures ou d’insultes (contre 29 % il y a deux ans), 15 % de harcèlement moral (contre 12 %), 39 % de menaces verbales ou écrites (contre 28 %) ; 6 % d’agressions ou de violences physiques (contre 5 %), 27 % d’attaques sur les réseaux sociaux ou sur Internet (contre 20 %).

« Ces chiffres, certes déclaratifs et donc différents des plaintes déposées, confirment la difficulté croissante des maires à faire respecter le droit mais plus encore à trouver des parades au non-respect de l’autorité », jauge le directeur du CEVIPOF, Martial Foucault dans son décryptage. « En réalité, beaucoup de maires renoncent à signaler toute forme de violence subie (y compris physique) en raison des conséquences attendues ou représailles, ajoute-t-il. À cet égard, les violences subies par les maires touchent parfois leur entourage familial immédiat. Ainsi, 12 % des maires déclarent que leurs proches ont également été victimes des mêmes comportements répréhensibles.

Climat de défiance

Au chapitre de la démocratie locale, les élus municipaux broient aussi du noir. L’abstention-monstre aux dernières élections locales est passée par là. Si la crise sanitaire n’a, à l’évidence, pas favorisé la participation, elle n’est pas loin s’en faut, la seule grille d’explication. Les maires en sont pleinement conscients. 62 % d’entre eux se disent inquiets face à l’abstention électorale. 38 %, a contrario, se montrent confiants, jugeant que les Français restent attachés à la figure du premier magistrat de leur commune.

Les bons scores du RN et de LFI aux scrutins nationaux chamboulent des maires le plus souvent LR et PS dans les villes et sans étiquette dans les plus petites communes. Près de 51 % d’entre eux observent un durcissement des positions de leurs administrés depuis la présidentielle. Principale cause à leurs yeux : la fracture territoriale (A 56 %), loin devant l’insécurité (37 %) ou les questions relatives aux minorités culturelles et religieuses (15 %).

A l’évidence, les maires entendent se poser en fantassins de la République face aux « passions tristes » dénoncées par Emmanuel Macron. Le congrès des maires leur donne une occasion de manifester leur unité.

Les maires broient du noir