Dans un référé rendu public le 28 octobre, la Cour des comptes met en garde contre les imprécisions de la politique de rénovation énergétique des bâtiments et son manque d’évaluation.
Alors que l’Agence nationale de l’habitat vient d’être épinglée par le Défenseur des droits pour la complexité d’accès au dispositif MaPrimeRenov, la Cour des comptes pointe à son tour les imprécisions de la politique de rénovation énergétique des bâtiments.
La Cour estime à 7 milliards d’euros en 2021 (hors plan de relance) le montant de la dépense publique pour les différents dispositifs de rénovation énergétique, et alerte sur « la nécessité de rationaliser rapidement la définition des objectifs, les moyens mobilisés et le suivi des résultats afin de pouvoir mesurer la performance effective des investissements réalisés ».
Mieux articuler les outils
Elle note, tout d’abord, une mauvaise articulation entre les référentiels de performance énergétique et les différents outils d’incitation à la rénovation. Les efforts récents avec la mise en place d’une unique prime de transition énergétique nommée MaPrimeRénov’ pour les particuliers ne répondent que partiellement à la simplification souhaitée selon la Cour : ainsi, de nombreux paramètres déterminant les critères d’éligibilité et les conditions de cumul, notamment avec les CEE, ne font pas toujours l’objet d’un suivi.
Y a-t-il un pilote dans l’avion ?
Pour la Cour, il manque un pilotage fort de la politique de rénovation énergétique et un accompagnement territorial. En janvier a été créé le service public de la rénovation énergétique, confié à l’Agence nationale de l’habitat, dont la mission est justement d’assurer ce pilotage concernant le parc privé de logements. Interviennent également le ministère chargé du Logement pour le parc social, la direction de l’immobilier de l’Etat pour les bâtiments tertiaires du secteur public, tandis que les collectivités territoriales peuvent agir sur leur propre parc et solliciter, à ce titre, des aides mais également proposer un accompagnement aux ménages de leur ressort.
La coordination de l’ensemble relève aujourd’hui d’une mission interministérielle de la politique de rénovation énergétique des bâtiments, créée à l’automne 2019. « Dotée toutefois de faibles moyens, cette mission n’est pas équipée pour assumer le pilotage national de la politique de rénovation énergétique et, en particulier, le suivi des actions en lien avec les collectivités territoriales », note la Cour.
Mesure de performance
Enfin, l’efficacité des aides attribuées est insuffisamment mesurée et « les aides financières à la rénovation énergétique des bâtiments sont conçues à partir d’un objectif de massification plutôt que de performance des rénovations. Si certains dispositifs comportent des majorations en faveur des projets de rénovation ambitieuse et performante, on observe que les consommateurs sollicitent essentiellement des aides en faveur de gestes isolés de rénovation, en l’absence d’un plan d’ensemble visant l’atteinte d’une haute performance énergétique », relève la Cour.
Au vu de ces constats, la Cour formule donc une série de recommandations. Tout d’abord, le pilotage national de la politique de rénovation énergétique doit être amélioré et les dispositifs de soutien doivent être simplifiés, de même que leurs règles de cumul. Enfin, une meilleure estimation des dispositifs d’aide doit être réalisée au regard des bénéfices qu’ils sont censés apporter.
Les espoirs de France Renov
En réponse à ces critiques et propositions, la Première ministre insiste sur les effets positifs que devrait apporter le pilotage par l’Anah de France Renov à terme, avec un recentrage sur les ménages aux plus faibles revenus et de véritables gains énergétiques des travaux. Au 1er janvier 2023 entrera en vigueur le dispositif Mon Accompagnateur Renov, qui permettra d’améliorer les travaux réalisés par les particuliers en matière d’efficacité énergétique. Elle met enfin en avant le travail réalisé par la coordination gouvernementale pour le plan de rénovation énergétique des bâtiments, créée en 2019, qui a « notamment permis d’engager des actions d’amélioration de la politique de rénovation des bâtiments, en particulier sur la simplification du parcours des ménages. Cette équipe a permis la réalisation collective d’actions concrètes, comme la mise en place d’indicateurs territorialisés pour le suivi de cette politique publique prioritaire ».